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En Vaucluse, la CDPENAF se rebelle !

Coup sur coup, la CDPENAF vient de voter « contre » deux projets majeurs d’aménagement du territoire … la très consensuelle Commission Départementale de Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers de Vaucluse se rebelle !

Ces deux avis défavorables constituent une véritable révolution pour une commission se limitant bien souvent à recommander aux élus, grands consommateurs de foncier, de modérer les extensions en se conformant mieux au « règlement applicable aux extensions et annexes des bâtiments d’habitation existants dans les zones agricoles et naturelles ».

Du fait même de sa composition, cette commission ne garantit pas la préservation du foncier censée être son objet. Il est clair que la CDPENAF a plutôt moins de pouvoir que l’ancienne CDCEA (Commission Départementale de Consommation des Espaces Agricoles). Le remplacement de l’une par l’autre devait pourtant améliorer l’économie d’espace.
France Nature Environnement Vaucluse a souligné à maintes reprises que, dans le département, la CDPENAF ne faisait guère obstacle à une artificialisation qui frise le record national.
Mais « trop c’est trop !  » et les membres de la commission viennent de le faire savoir.

Les deux projets sont, d’une part, celui du SCoT révisé du Bassin de vie d’Avignon, arrêté en décembre 2019, et, d’autre part, celui de la maison d’arrêt d’Entraigues sur la Sorgue.

Le projet de SCoT du Bassin de vie d’Avignon

La CDPENAF de Vaucluse, le 27 août 2020, s’est réunie pour statuer sur le projet de SCoT du Bassin de Vie d’Avignon, arrêté depuis le 9 décembre 2019. Pour FNE Vaucluse, il s’agit, hélas, d’un mauvais projet qui cache mal, sous des jeux d’écriture, la boulimie d’artificialisation des élus. Les suggestions de modification se sont heurtées à des fins de non-recevoir.

Un peu plus d’un an auparavant, le 16 mai 2019, les membres de la CDPENAF avaient accueilli avec indulgence le SCoT de l’Arc Comtat Ventoux. Le projet n’était pas meilleur mais les membres de la commission caressaient secrètement l’espoir que cette main tendue aiderait à obtenir des élus quelques aménagements de bon sens. Depuis, malheureusement, toutes les demandes n’avaient rencontré qu’intransigeance et rigidité.

La crainte d’un nouveau marché de dupes a peut-être joué dans le refus du projet du Bassin de vie d’Avignon. Nul ne le saura jamais ! Sachant que seule une action en justice peut ramener à la raison une commune qui, bien adossée à un SCoT permissif, urbanise et s’étale à tout-va, il ne s’est trouvé aucune voix à la CDPENAF, pour approuver ce projet.

Peut-être est-ce un peu injuste, mais la liste des arguments par lesquels la commission justifie son avis défavorable est fort longue !

Le projet de maison d’arrêt d’Entraigues sur la Sorgue

La CDPENAF a examiné, le 20 octobre 2020, ce projet, imposé de A à Z par l’État (Architecture, capacités d’accueil, Zone…). La saisine de la commission est d’un type particulier. Il s’agit en effet d’une « étude préalable agricole », déposée par l’Agence pour l’Immobilier de la Justice (APIJ). Son but est d’évaluer l’impact du projet sur l’économie agricole, d’exposer les mesures d’évitement et de réduction mises en œuvre, et de proposer les mesures de compensation collective envisagées pour consolider l’économie agricole du territoire.

Le projet est fortement créateur d’emploi (plus de 200 emplois temps plein) pour une quinzaine « seulement » d’hectares artificialisés.

Pour autant, France Nature Environnement déplore que l’impact sur la nature et la vie du territoire ne soit pas, dans le contexte étroit de la « compensation agricole », pris en compte.
La fédération soutient d’autre part le collectif « Sauvons nos terres 84 », dont fait partie l’association de soutien au Plan d’Entraigues. Comme cette dernière, nous souhaiterions que l’on protège mieux les agriculteurs en place plutôt que de dédommager l’agriculture.
Enfin, FNE regrette que la capacité d’accueil de la future maison d’arrêt ait été choisie de telle manière que seule une implantation en campagne soit possible. La volonté du Garde des Sceaux, demandant de privilégier la recherche de foncier en zone urbaine dense (courrier du 9/12/2016), est ainsi contournée …et la consommation de terres fertiles avérée !
Un peu perfidement, l’APIJ écrit dans sa présentation « Les exploitations de la zone du Plan subissent depuis quelques années des pressions foncières très importantes liées à des projets d’infrastructures et plus globalement, au développement de l’urbanisation ». Elle énumère, à l’appui de sa constatation, tellement de « pressions foncières » à l’œuvre, qu’il est aisé de comprendre combien il serait malvenu de lui demander d’économiser des terres que les responsables locaux artificialisent à tout-va !

Et maintenant ?

La CDPENAF a joué son rôle, mais elle n’a pas le pouvoir de modifier des projets jugés inadaptés. Elle peut juste « éclairer » le préfet de ses avis.

Elle peut inciter les élus à prendre conscience que leurs priorités sont à réinventer.

Concernant le projet d’établissement pénitentiaire, les agriculteurs ont quitté la réunion en faisant savoir qu’ils reviendraient sur leur vote défavorable si l’on réévaluait le montant de la compensation agricole.

Un pragmatisme reçu 5 sur 5 par le Préfet de Vaucluse ! Après avoir négocié à la hausse le montant de la compensation, il a publié, dès le 4 décembre 2020, son avis favorable sur l’étude préalable.

Il y aura un retour devant la CDPENAF, avant le 1er avril 2022. Mais ce sera seulement pour l’informer du programme d’action définitif de mise en œuvre et de suivi.

Le dossier n’est pas clôt pour autant, car ni le PLU d’Entraigues ni le SCoT du Bassin de vie d’Avignon ne prévoient l’implantation de la maison d’arrêt.

Et, dans le cadre de cette mise en conformité, il sera nécessaire de ré-examiner en CDPENAF le SCoT du Bassin de vie d’Avignon.

L’occasion, peut-être, de discussions plus fructueuses avec les élus qui le construisent ?