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« Charte de bon voisinage » : l’introuvable consensus

Au sein du mouvement France Nature Environnement, FNE Vaucluse faisait un peu figure d’exception : portée par des relations traditionnellement franches avec la chambre d’agriculture, la fédération départementale avait entamé des discussions pour qu’une « charte de bon voisinage » réglemente, au mieux des intérêts de tous, riverains comme agriculteurs, les épandages de pesticides à proximité des habitations.

Les négociations ont commencé en octobre 2019. Elles ont bénéficié de l’attitude ouverte de la Présidente de la chambre. Mais également des encouragements du Préfet du département, ainsi qu’il l’avait confirmé dans un entretien du 16 décembre 2019. Cependant, ces négociations n’ont résisté ni aux extrémistes de tous bords ni aux décisions gouvernementales.

Un gouvernement subitement pressé

En juin 2019, le Conseil d’État avait abrogé partiellement un arrêté de mai 2017 encadrant l’utilisation des pesticides. Au motif retenu qu’il offrait une protection insuffisante contre les effets de ces substances toxiques. Et ce, vis-à-vis des riverains et des travailleurs … mais aussi de la ressource en eau.

Pour se mettre en conformité avec la décision du Conseil d’État, le gouvernement prend, le 27 décembre 2019, deux décisions.

Tout d’abord, celle d’encadrer l’élaboration des chartes (cf. le décret relatif aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d’habitation).

Et puis, il fixe des mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques (cf. l’arrêté du 27 décembre 2019). Cet arrêté modifie celui du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.

Les deux textes du 27 décembre instaurent notamment des distances minimales à respecter. Ils créent des Zones de Non Traitement (ZNT) au voisinage des zones d’habitation pour le traitement des parties aériennes des plantes en milieu non fermé.

Mais l’incroyable diversité des paysages, des terroirs, et des pratiques agricoles du pays ont été ignorées. Et, au final, ces « zones de non traitement » (ZNT) sont absurdement uniformes.

Un syndicat agricole violemment opposé

À l’écoute des cultivateurs désespérés par les difficultés de tous ordre, la FNSEA n’a pas de mal à convaincre ses adhérents que les ZNT sont trop importantes. Ni qu’elles vont diminuer exagérément la « surface cultivable utile ». Il faut donc enfreindre et combattre cette loi coercitive.

Des associations combatives

Persuadées qu’il y a urgence à changer les pratiques agricoles, 9 associations de protection de l’environnement, de consommateurs, de la santé, se mobilisent contre ces ZNT trop peu étendues pour être protectrices et attaquent le décret et l’arrêté devant le Conseil d’État aux motifs que
– les textes ne protégeront pas les habitants (travailleurs et riverains) des dangers des pesticides,
– les textes ne protégeront pas non plus les milieux, et tout particulièrement la ressource en eau, des pollutions liées aux épandages de pesticides.

Les projets de Charte, qui misaient sur un consensus possible, ont été abandonnés

En quelques mois, dans la continuité de nos précédentes actions, nous avons accompli un important travail de préparation avec différentes acteurs, agriculteurs, technicien agricole, agronomes. Nous avons initié ou participé à de nombreuses discussions.
Lors de notre dernier rendez-vous avec la Chambre d’Agriculture, le 14 mars 2020, nous avons appris que le travail que nous avions entrepris n’était plus d’actualité. Et qu’une nouvelle charte était désormais proposée, amendable par les seuls agriculteurs. Une fois cette charte avalisée, elle serait simplement présentée aux partenaires, avant validation par le préfet.
Nous n’avons pas eu de communication officielle de ce projet de charte. Les textes qui nous sont parvenus depuis d’autres départements, s’ils sont exacts, sont inacceptables.

Nous ne voulons pas de cette situation sans avenir ni pour nous, ni pour les paysans

« Si tu veux la paix, prépare la guerre ». N’en déplaise à Jules César, nous pensons au contraire, qu’à trop fourbir les armes, chacun dans l’entre soi, c’est la guerre qui devient inévitable.
La porte de notre fédération restera donc ouverte, tout comme nous savons que celle de la chambre d’agriculture nous reste ouverte.
Pour qu’un jour, une discussion, pour l’instant en complet stand-by mais absolument indispensable, reprenne.

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