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Les loups, qui sont-ils, comment vivent-ils ?

C’est à l’initiative du groupe LPO du Mont Ventoux, que Pierre Rigaux, membre de la Société Française pour l’étude et la protection des mammifères, donnait à Carpentras cette conférence apportant un éclairage scientifique sur ces animaux qui dérangent.

Une soirée sous tension où, devant une salle comble, le délégué à l’environnement de la ville menaçait d’avoir recours à la force publique en cas de troubles, le président de la LPO certifiait qu’il ne s’agissait que d’un exposé naturaliste, le conférencier était nettement sur la défensive…

Une soirée positive car, malgré des échanges parfois vifs, animés par des éleveurs ovins venus en nombre, malgré un temps de parole un peu écourté et des questions que nous n’avons pu poser au grand spécialiste qu’est Pierre Rigaux, tous ont fait la preuve qu’en Vaucluse au moins, l’on pouvait parler du loup. La frustration de n’avoir pas eu de réponse aux questions que nous n’avons pas formulées a été largement compensée par les discussions impromptues à la sortie de la salle, comme si, une fois qu’il était admis que chacun était en droit de s’exprimer, la nécessité de l’échange l’emportait sur celle de rentrer chez soi !

Il existe une version filmée des propos de Pierre Rigaux, ainsi que des comptes-rendus par lui même et par le groupe LPO organisateur. Ce que nous avons retenu c’est que :
– non, le loup n’est pas un animal aux dimensions impressionnantes : ses 25 à 35 kg en font un animal plus petit que le « chien loup »
– oui, il craint l’homme, en tous cas il peut se montrer extrêmement discret
– oui, c’est un incroyable voyageur qui a remonté l’Italie pour s’installer dans nos Alpes françaises et, de là, est parti coloniser les Pyrénées !
– non, il ne fait pas disparaître le gibier : il prélève les animaux à sa portée, ce dont il a besoin, pour se nourrir. Il tue « proprement », c’est-à-dire vite et bien, parce qu’à la différence du chien, il n’a pas désappris la mise à mort rapide d’une proie, et que l’efficacité en la matière est gage d’économie d’énergie
– Oui, il lui arrive de manger des moutons : une étude de l’ONCFS montre que les ovins constituent de 16 à 50% (quand même !) de l’alimentation d’une meute. Nous aurions bien aimé demander à Pierre Rigaux si l’ONCSF était allée plus loin que l’étude des crottes de loups (ce sont elles qui permettent à coup sûr de reconstituer l’alimentation d’un animal) et avait essayé de déterminer pourquoi la meute incriminée (celle dite « de Vésubie-Roya ») était passée du gibier sauvage à la brebis domestique, mais le sujet était sensible…
– oui, il arrive au loup de ne pas pouvoir s’arrêter de tuer, et ce bien au-delà de ses besoins alimentaires (« Overkilling ») « Au cours de sa domestication, la tendance du mouton à se regrouper en cas de danger a été renforcée sélectivement. Pour l’homme, cela facilite le maniement d’un troupeau. Le mouton n’est pas un animal stupide, (…) C’est simplement que ce réflexe que nous avons développé à outrance en lui peut se tourner contre lui quand il est attaqué par un prédateur. (alors que) si ce sont des chevreuils, des sangliers ou d’autres proies sauvages, cela sera rare. » explique Baudouin de Menten dans « La buvette des Alpages » le 4 janvier 2015. En bref, le gibier sauvage s’égaye dans la nature et limite les morts en cas d’attaque de prédateur, alors que le mouton dans son enclos, aura tendance à se regrouper, à attendre et à subir la tuerie. Pierre Rigaux cite à contrario le cas de deux loups à l’affût tuant un mouton lors d’un déplacement de troupeau. L’étirement du troupeau sur le chemin était tel que les loups ont opéré en toute discrétion, sans « dégâts collatéraux » de troupeau affolé se précipitant dans le ravin ni d’overkilling
– Non, le loup n’est pas à lui tout seul l’alpha et l’oméga des difficultés de l’élevage ovin en France. Les « prélèvements » du loup (environ 8 000 bêtes par an) ne représentent que 1 % des pertes annuelles toutes autres causes confondues, sur le territoire commun (mais il est vrai que les éleveurs font état de pertes plus importantes liées aux avortements de stress qui, chez les brebis épargnées, suivent les attaques). Il paraît cependant plus facile de faire de l’animal un bouc émissaire que de se pencher sur les difficultés structurelles d’une filière … et l’Etat se garde bien de demander à ses scientifiques d’étudier de vraies modalités de protection des bergers. Nous nous interrogeons aussi sur l’absence de missions d’informations vers des pays qui ont résolu le problème de la cohabitation pastoralisme et loup. Enfin quelques bergers se plaignent de la difficulté supplémentaire de gérer les chiens Patou : là aussi existent des moyens !

En conclusion, mais cela n’engage que nous, nous sommes repartis de cette conférence avec le sentiment que les éleveurs ovins ET le loup, étaient victimes, ensemble, d’une certaine paresse étatique.
Afin de continuer le dialogue qui s’établissait entre éleveurs et défenseurs du loup, nous publions
le tract des éleveurs, distribué à l’entrée de la conférence « Petites rectifications et contrevérités » et « l’autre son de cloche »
– le nouveau livret « Loup, pour en finir avec les contrevérités sur le pastoralisme et sur la chasse »