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Affaire Jo.Pro.Chim : la Cours d’Appel indemnise FNE Vaucluse

Présentation de Jo-Pro-Chim et de ses activités

Située à Vedène dans le département du Vaucluse, la société Jo-Pro-Chim est spécialisée dans la fabrication de sels, de produits chimiques industriels et de produits pour pisciniers. Ces activités l’amènent à stocker et à reconditionner des produits tels qu’acide sulfurique, acide nitrique, acide chlorhydrique et soude.

Cette entreprise bénéficie d’un récépissé de déclaration n° 2000/057 du 14 septembre 2000 délivré par le préfet de Vaucluse pour les activités de stockage d’acides, installation classée soumise à déclaration relevant de la rubrique n° 1611-2 de la nomenclature des installations classées.
L’exploitation de ces stockages de produits chimiques est assujettie au respect des prescriptions de l’arrêté ministériel du 6 septembre 2000pris en application de l’article L. 512-10 du code de l’environnement codifiant l’article 10-1 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement.

Rappel des faits

L’exploitation de ces stockages d’acides a conduit à une longue suite d’incidents ayant eu des conséquences néfastes sur l’environnement et sur le confort du voisinage :

1) A la suite de la rupture d’une cuve d’acide sulfurique à 98 % dans la nuit du 29 au 30 avril 2007, 18 m3 de cette substance se répandent dans la cuvette de rétention non étanche. Compte tenu de la fissuration de la cuvette de rétention, seuls 4 m3 sont récupérés et 14 m3 s’écoulent sur un terrain voisin appartenant à la Fromagerie du Ventoux. Un rapport de la DREAL du 30 avril 2007 relate les conditions dans lesquelles s’est déroulé cet incident.

Par arrêté du 30 avril 2007 , le préfet du Vaucluse prescrit des mesures d’urgence à la société JO.PRO.CHIM à exécuter sous une huitaine de jours (nettoyage des terres polluées et élimination des déchets, diagnostic approfondi des sols, confinement de la zone contaminée).

Le 3 mai 2007, la DRIRE procède à une inspection des installations de la société JO.PRO.CHIM et dresse deux fiches d’écarts n° 1 et n° 2.

2) En fin d’après-midi du 29 mai 2007, un salarié de l’entreprise JO.PRO.CHIM oublie de fermer la vanne de la cuve de solution concentrée d’acide chlorhydrique (HCl). Dans la nuit du 30 mai au 1er juin 2007, une fuite sur une cuve d’acide chlorhydrique provoque un écoulement régulier de 2 litres d’acide chlorhydrique dans la cuvette de rétention pour la remplir progressivement de 200 litres. Au contact de l’eau de pluie présente dans la cuvette de rétention à la suite d’un orage, l’acide s’hydrolyse pour former du chlorure d’hydrogène prenant l’aspect un nuage blanc intoxiquant vers 4 heures 30, 5 employés de la Fromagerie du Ventoux hospitalisés pendant 5 heures pour subir des examens.

La solution acide retenue dans la cuvette de rétention est vidangée vers la station de traitement du site mais 100 litres sont rejetés dans la cour de la Fromagerie du Ventoux à cause d’une fuite sur la ligne de transfert.

Ces faits donnent lieu à un rapport de la DREAL du 1er juin 2007, à une enquête préliminaire de la gendarmerie (procès-verbal d’enquête et photographies jointes, Cette procédure a été classée sans suite.

Par arrêté du 1er juin 2007, le préfet du Vaucluse prescrit des mesures d’urgence à la société JO.PRO.CHIM en suspendant le fonctionnement des activités de stockage d’acides et de bases à l’origine des incidents jusqu’à l’élimination des déchets, des terres et eaux polluées, l’étanchéité des cuvettes de rétention et la formalisation des mesures organisationnelles pour éviter le renouvellement de ces incidents.

3) Le 3 octobre 2007, un déversement d’un bidon de soude destiné à neutraliser le PH des produits rejetés dans les égouts provoque une émanation d’odeur chlorée à proximité des locaux de la société JO.PRO.CHIM. Un procès-verbal de la gendarmerie du 4 octobre 2007 en relate les circonstances. Cette procédure a été classée sans suite.

4) Le 19 février 2008, une nouvelle fuite de chlore provenant d’un dysfonctionnement de la station de neutralisation de la société JOPROCHIM provoque des nuisances olfactives dans le réseau communal d’eaux usées de la zone d’activités de Chalancon 1 à Vedène. En application de l’article R. 512-69 du code de l’environnement, la société JO.PRO.CHIM a transmis un rapport d’incident à la DRIRE.

5) Le 9 juin 2011, un écoulement d’acide chlorhydrique s’épand sur le terrain de la fromagerie voisine du Ventoux. La surface impactée est estimée à 50 m2.

Les 10 et 20 juin 2011, la DREAL procède à une visite d’inspection de l’établissement de la société JO.PRO.CHIM. Dans un rapport du 30 juin 2011 et dans des fiches d’écarts, elle recense diverses infractions à l’arrêté ministériel du 6 septembre 2000 réglementant les stockages d’acides. Elle y découvre surtout un stockage de 19 tonnes de perchloréthylène exploité sans autorisation préfectorale et dans des conditions contraires à l’arrêté ministériel du 5 octobre 2010 réglementant ce stockage (pièce 12).

Ces infractions font l’objet d’une procédure de la gendarmerie et de la DREAL, enregistrée au bureau d’ordre du parquet du tribunal de grande instance d’Avignon sous le numéro 11231400076.

Le 8 juillet 2011, le préfet du Vaucluse prend 3 arrêtés, le premier portant mesures d’urgence, le deuxième mettant en demeure de respecter les prescriptions techniques d’exploitation et le troisième mettant en demeure de déposer un dossier de demande d’autorisation d’exploiter un stockage de 19 tonnes de perchloréthylène.

C’est dans ces conditions que FNE et FNE Vaucluse ont porté l’affaire devant le Tribunal correctionnel d’Avignon. Le 14 février 2013, le jugement a été rendu par le Tribunal :

La SARL JO.PRO.CHIM et son gérant Monsieur MAUROUARD Emmanuel sont déclarés coupables chacun de six contraventions, et condamnés pour :
Exploitation non conforme d’une installation classée non autorisée (commise le 20 juin 2011) ;
Exploitation non conforme d’une installation classée non déclarée : qualifiée pour cinq infractions relevées le 20 juin 2011.
Les coupables ont été condamnés à verser six fois 3 300 euros pour la société JO.PRO.CHIM, et six fois 1 000 euros pour Monsieur MAUROUARD, en raison des 6 contraventions commises.

– Sur l’ACTION CIVILE, les constitutions de partie civile de FNE et FNE VAUCLUSE ont été jugées recevables. Toutefois, le tribunal a considéré que le préjudice de FNE VAUCLUSE devait être réparé à hauteur de cinq cents euros (500 euros), FNE quant à elle s’est vue déboutée des demandes qui tendaient aux mêmes fins, de sorte que son préjudice n’a pas été reconnu.

FNE et FNE VAUCLUSE ont alors fait appel de cette décision, considérant que tribunal correctionnel d’AVIGNON n’avait pas suffisamment indemnisé leur préjudice.

Préjudice reconnu et indemnisations pour FNE et FNE Vaucluse

Le tribunal de Nîmes vient de rendre son délibéré : Jo.Pro.Chim est condamné à indemniser FNE à hauteur de 1 500 € et FNE Vaucluse à hauteur de 3 000€. (lire le jugement)

Chaque association recevra en outre 1 500€ pour les frais de justice engagés.

Ces indemnisations permettront à FNE Vaucluse de poursuivre d’autres pollueurs devant les tribunaux.